Reportage à Sarajevo : Ratko Mladic laisse "le souvenir d’un monstre"

Des Bosniaques de Sarajevo apprennent hier à la télévision l'arrestation du général Ratko Mladic. - ©AFP/Elvis Barukcic

Reportage à Sarajevo : Ratko Mladic laisse "le souvenir d’un monstre"

FRANCE INFO - 07:55Le général Ratko Mladic a été arrêté hier, après seize années de cavale. Il est accusé de génocide, crime de guerre, de crime contre l’humanité, et doit comparaitre devant le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (La Haye). 

L’ancien chef militaire des Serbes de Bosnie est tenu pour responsable du siège de Sarajevo et du massacre de Srebrenica, qui a qui a coûté la vie à quelque 8.000 Bosniaques musulmans en 1995. Deux événements qui restent à jamais gravés dans la mémoire de toute une population. 
Ce matin sur France Info, regard d’un couple de Sarajevo sur l’arrestation de celui qu’on a surnommé "le boucher des Balkans".

	Regard d’un couple de Sarajevo sur l’arrestation de Ratko Mladic Le reportage de l’envoyé spécial de France Info en Bosnie, Sébastien Paour  (5'07")

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Envoyé spécial de France Info en Bosnie, Sébastien Paour a rencontré un couple de trentenaire qui a grandi à Sarajevo. Ils avaient 9 et 12 ans quand le général Ratko Mladic a commencé à assiéger la ville, en avril 1992, à coups de tirs de mortiers et de snipers.

A cette époque, ils ne se connaissent pas encore. Elle, Nermina, est musulmane. Elle travaille dans une organisation internationale. Elle a fui Sarajevo dès 1993 pour Split, puis pour la France, où elle est restée quatre ans et où elle a appris le français. Lui, Sergdan, est Serbe. Il est informaticien dans une entreprise qui fabrique des imprimantes. Ils se sont pourtant mariés, plusieurs années plus tard, en terrain ’neutre’ si l’on peut dire, en Croatie, malgré l’opposition ou l’incompréhension de leurs familles.

Ils ont appris hier que l’homme le plus recherché en Europe, l’organisateur du siège de leur ville qui a duré trois ans-et-demi et fait plus de 10.000 morts, que le général Mladic avait été arrêté en Serbie. Nermina n’a pas sauté de joie pour autant. "On ne sait pas ce qu’il va se passer maintenant, justice n’est toujours pas faite et il y a une possibilité qu’il meure avant d’être jugé", explique la jeune femme. " C’est une histoire sans fin ", qui a encore des conséquences dans la Bosnie d’aujourd’hui. Nermina parle d’une situation "difficile à vivre au quotidien", ce sont ses mots. Elle précise tout de suite que les musulmans ne sont plus persécutés, qu’on ne cherche plus à les chasser de toutes les régions où les Serbes sont majoritaires, comme c’était le cas entre 1992 et 1995, mais elle décrit un pays encore très divisé et où l’arrestation de l’ancien chef militaire des Serbes de Bosnie ne va pas changer grand-chose, en tout cas pas tout de suite. Sergdan est comme son épouse. Il estime que s’il n’y a pas eu d’explosion de joie hier à Sarajevo, c’est qu’il s’est passé trop de temps entre la fin de la guerre et l’arrestation de Mladic. " C’est trop tard pour se réjouir [... ] il ne nous reste que de la tristesse et de la douleur ", explique-t-il.

Le souvenir d’un "monstre", c’est le mot employé par le couple quand on lui demande ce qui va rester de Ratko Mladic. Nermina dit qu’on ne peut pas hiérarchiser les crimes dont il est accusé, les 10.000 morts du siège de Sarajevo ou les 8.000 de l’enclave de Srebrenica. C’était un stratège diabolique, selon elle. Un monstre fatigué, qui a l’air malade, dont la photo fait la Une évidemment de tous les journaux ici ce matin. Un monstre que Nermina et Sergdan voudraient juste voir condamné le plus vite possible par le TPI de La Haye.

Reportage : Sébastien Paour, envoyé spécial à Sarajevo 
Page web : Cécile Mimaut

source: france-info