Des réfugiés tunisiens refusent de quitter un immeuble parisien


Par Benoît Magistrini
Le 17 avril, à la gare de Vintimille, militants français et italiens manifestent sur la voie après l'annulation du "train de la dignité", qu'ils comptaient prendre pour accompagner une soixantaine de migrants de l'autre côté de la frontière.
AFP PHOTO / CATHERINE MARCIANO

130 réfugiés tunisiens, pour la plupart passés par l'Italie, ont investi depuis le 1er mai un immeuble vide dans le 19ème arrondissement, refusant hier la proposition de la mairie de Paris de les reloger.

Les matelas s'entassent, la nourriture et l'eau sont portées aux fenêtres, les réfugiés tunisiens s'organisent au 51 avenue Simon Bolivar. C'est la seconde nuit que 130 migrants du Collectif des Tunisiens de Lampedusa ont passé dans ce bâtiment vide de la mairie de Paris dans le 19e arrondissement, en face du Parc des Buttes Chaumont. Déjà occupé mi-avril par le collectif Jeudi noir, l'immeuble, sous le coup d'un arrêté de mise en péril, avait été évacué rapidement pour des raisons de sécurité. 
Hier, pourtant, les squatteurs, pour la majorité des jeunes, dont quelques mineurs, ont refusé la proposition de la mairie de Paris qui prévoyait le relogement de 95 personnes dans trois hôtels le soir même, puis le reste des occupants aujourd'hui avec l'aide d'Emmaüs et France Terre d'Asile. Pour Sonia Buscarini, secrétaire générale CFDT de Paris, ces murs de fortune "ne sont pas adaptés et il serait plus raisonnable de quitter les lieux rapidement." 
Jusque là, les migrants occupaient en grande partie le Parc de la Villette, où certains d'entre eux sont restés malgré les interpellations du mercredi 27 avril. "Nous souhaitons mettre la mairie devant le fait accompli, martèle Willbourn, qui soutient le mouvement. Bertrand Delanoë doit comprendre que les mots ne suffisent pas." Le maire de Paris s'est alarmé le 26 avril au micro d'Europe 1 du traitement réservé aux réfugiés, qualifiant de "minable" la réaction de l'Etat sur fond de débat sur l'espace Schengen
Malgré mes diplômes, il n'y a rien à gagner en Tunisie 
"Nous sommes fatigués, nous avons faim, nous voulons des papiers et la liberté, manifeste Makki, un membre du collectif. Cela fait depuis fin janvier que j'ai quitté la Tunisie sans trouver de répits." Le jeune homme, qui garde le sourire, a passé 22 heures en mer avant d'atteindre les côtes italiennes. Passé par Vintimille, il a réussi à passer la frontière en voiture jusqu'à Nice, Marseille et enfin Paris, après avoir été réexpédié lors d'une tentative avortée en train. Il vit désormais comme un SDF sur les bancs du métro ou dans des parcs d'où il est chassé régulièrement. "On n'a pas le droit de vivre ou quoi?", s'exclame-t-il lorsqu'il évoque la pression en France. 
"Les migrants tunisiens découvrent avec stupeur la réalité de la France", raconte Imed, délégué du 9e collectif des sans-papiers qui assure que tout se passe bien dans le bâtiment. Pour lui, la réunion a montré la motivation des réfugiés à rester longtemps et obtenir des aides efficaces. "Depuis qu'ils sont arrivés, il y a de véritables rafles, dénonce Henri, un militant au milieu de la centaine de personnes présentes pour soutenir le mouvement. Ils souhaitent seulement être traités avec dignité." 
"La révolution, c'est l'instabilité, répond un Tunisien à une résidante excédée. Ce n'est pas une partie de plaisir, l'exil est long et dangereux. Beaucoup sont morts." Samy, un sans-papier en France depuis quelques années, soutient les squatteurs: "Le coeur est là-bas, mais la raison est ici. Malgré mes diplômes, il n'y a rien à gagner en Tunisie." En prison pendant 20 ans pour s'être opposé au régime de Ben Ali, il voit d'un mauvais oeil la reconstruction démocratique en cours: "Il faut de l'unité, mais rien ne va dans ce sens."
source: Lexpress

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