Libye Sur le port de Tripoli, un hangar anéanti
)Dans la soirée de lundi, une base de la marine libyenne située à 10 km à l'est de Tripoli a été touchée.
REUTERS/Ahmed Jadallah
Visite guidée d'un site militaire dévasté, dans la nuit de lundi, près de Tripoli, par une pluie de missiles Tomahawk.
Journée faste. Deux excursions au menu de ce mardi. D'abord, du classique : la virée sur la Place Verte, le coeur battant de Tripoli, théâtre d'un happening militant et musical permanent des "kadhafistes" fervents ; et succursale hors-les-murs de l'hôtel Rixos, le QG des médias étrangers. Terrasses modérément animées, boutiques ouvertes pour moitié: l'avenue Omar al-Moukhtar cultive un semblant de normalité. Même si, en chemin, il arrive qu'une grappe de voitures sature les abords de telle station-service. Autre indice d'une tension à peine palpable, l'envolée des cours des devises au marché noir, à l'entrée de la médina: jusqu'à 240 dinars pour 100 dollars, contre 200 la veille et 125 environ au cours officiels.
Credo
De même, dans les bijouteries voisines de la mosquée Ahmed-Pacha, le prix du gramme d'or est à la hausse. Planté devant une vitrine de parures ouvragées, Jassem contemple d'un oeil amusé le débarquement des reporters en voyage organisé. Très vite tombe l'inévitable "Where do you come from?" Allez, on se lance: "From France, Sir". Le quadra massif ne bronche pas. Mais son épouse se détourne illico, une moue dédaigneuse aux lèvres. En préambule, et dans un même souffle, Jassem enfile toutes les perles du catéchisme de rigueur. Dans l'ordre: Tout le monde ici adore Muammar Kadhafi ; seule la soif de pétrole guide l'Occident ; et la prétendue rébellion n'est que le faux-nez d'al-Qaeda. Après quinze minutes d'un échange viril, mais correct, le credo se fissure quelque peu. Ce qui donne, dans une version moins péremptoire : La plupart des Tripolitains aiment Kadhafi ; al-Qaeda fournit l'un des bataillons, parmi d'autres, de l'insurrection ; quant à la Jamahiriya -l'Etat des masses instauré en 1977-, elle aurait besoin d'un sérieux dépoussiérage.
Centre de formation
Une brève escale au Rixos, et nous voilà repartis. Cap cette fois sur le port d'Abou Setta, cible la nuit dernière d'une volée de Tomahawk. Sur le quai, jonché d'éclats de briques et de shrapnels, flotte une odeur de brûlé. Sous nos yeux, un chaos, encore fumant ça et là, de tôles noircies et de bidons métalliques roussis et éventrés. A droite, un lance-roquettes multiple carbonisé. A l'intérieur du premier hangar, sous un fatras de charpente métallique tordue, deux cratères et des carcasses de véhicules calcinées. Sur le côté droit, deux lanceurs mobiles de missiles sol-sol B-21 de facture soviétique, vitrifiés eux aussi par le feu et le souffle de l'explosion. Et derrière, trois missiles sous leur bâche de toile beige. "Ils ne sont pas chargés, insiste un officier de la marine libyenne. Vous pensez bien que dans le cas contraire, l'attaque aurait été bien plus dévastatrice. Ce n'est qu'un centre de formation, ici." L'atelier voisin, où nous escorte une poignée de miliciens armés de kalachnikov et de portraits du Guide, ne vaut guère mieux. "Quel rapport avec la protection des civils Libyens ?, s'étrangle Aïcha, l'une de nos accompagnatrices. Les Occidentaux veulent détruire le potentiel de ce pays. Comme ils ont voulu l'autre soir, en frappant Bab al-Aziziya, tuer le colonel Kadhafi." Sur un ton plus mesuré, un jeune capitaine se borne à déplorer "une catastrophe." Mais s'abstient de l'imputer aux seuls "agresseurs Croisés" que flétrit le régime.
Quel message cette sortie avait-elle vocation à diffuser ? Un site militaire anéanti. Pas un mort ni un blessé, aux dires mêmes de nos hôtes... Qu'illustre une telle escale sinon la vulnérabilité du dispositif libyen ? Alors même qu'on nous convie à couvrir des funérailles de civils sans cadavres, et que nous demandons en vain de rencontrer quelques rescapés des raids nocturnes de la coalition anti-Kadhafi. Une certitude : la stratégie de communication de la Jamahiriya, si stratégie il y a, a de quoi laisser pantois.
source: lexpress
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