Contre courant Une petite voix qui s’exprime à la marge du bouillon de slogans : A propos de la déclaration du Front 14 janvier : PARTIE 1
PREMIERE PARTIE
Le texte du Front 14 janvier mérite une analyse et une lecture approfondie. Qu’on soit d’accord ou
pas avec cette initiative c’est quasiment un devoir de l’analyser et de la prendre au sérieux du moment
qu’elle émane d’un ensemble d’organisations et de sensibilités politiques qui prétendent se placer au
cœur de la révolution et s’autoproclament sa direction. Le texte fondateur se veut l’expression des
revendications et des objectifs de la révolution. Il s’agit donc d’un front qui se voit capable (si l’on
croit le fantasme de ses auteurs) représenter le peuple et le conduire vers la réalisation des (supposés)
objectifs de sa révolution.
Anouar Kanzari
La constitution de fronts et d’alliances sur la base des revendications et des objectifs communs
dans ce contexte est, dans l’absolu, tout a fait légitime. C’est même positif. Il est temps pour les
forces politiques de commencer de politiser le peuple au sens large du terme (lequel, est pour
une fois, très à l’écoute et intéressé par la politique) après 23 ans de divorce prononcé et imposé
injustement par un despote Dictateur. Il est primordial que les partis politiques s’expriment dans
cette étape révolutionnaire de laquelle dépend tout notre avenir d’autant que, paradoxalement, les
acteurs principaux de notre magnifique révolution sont des jeunes qui ne font confiance ni aux
partis politiques existants ni aux partis tout court. Il est enfin très important que les partis politiques
s’expriment pour expliquer leurs identités et orientations politiques, au-delà des qualifications de
l’ancien régime que tout le monde partage actuellement (y compris ceux qui juraient l’infaillibilité
pontificale de ce régime jusqu’au dernier quart d’heure de son existence).
Le rassemblement des sensibilités politiques dans des alliances et coalitions autour de projets de
gouvernance est tout à fait naturel dans cette phase préélectorale. C’est par rapport à ces projets et
ces coalitions que le citoyens choisiront leurs futurs représentants et gouvernants utilisant le plus
démocratique et le plus révolutionnaire moyen qu’est le vote. C’est dans ce cadre, et c’est à ce juste
titre, que je me permets de saluer cette démarche pour son mérite du déclenchement du débat politique
avec ses prises de position publiques affichés et assumés par les partis signataires.
A la lecture du texte fondateur du Front 14 janvier j’apprécie la clarté du discours et de sa parfaite
transcription de l’identité de ses auteurs. Les signatures nous apportent aussi une nouvelle prometteuse
qui nous laisse penser qu’une famille politique (aussi réduite soit-elle) s’est enfin retrouvée après de
longues années de séparation où certaines composantes ont tantôt joué solo et tantôt entré dans des
alliances contre-nature avec des forces politiques portant les antipodes de leurs thèses.
Néanmoins, je ne peux pas m’empêcher d’exprimer certaines (voire plusieurs) interrogations et
réserves sur la forme et sur le fond du texte fondateur du front. Du titre jusqu’aux signatures du texte,
plusieurs clarifications méritent d’être apportées par ses auteurs.
Ce qui suit l’essentiel de ces réserves:
Le nom donné au front « Front 14 janvier » : Si je ne me trompe pas il s’agit du jour du
1.
départ de Ben Ali donc le jour où le peuple soulevé a réussi à faire tomber l’un des régimes les plus
répressifs du monde et qui a régné par la force et par le sang sur le pays pendant 23 ans. C’est donc un
événement exceptionnel historique de libération qui mérite d’être commémoré par tous les Tunisiens.
Je ne vois donc pas de quel droit les signataires s’accaparent cette date, qui sera très probablement une
fête nationale, pour l’identifier à une alliance qui regroupe une partie des forces politiques. D’autres
part, jusqu’à quand on continuera-t-on à mettre les dates de l’année au cœur des polémiques à la
Libanaise, entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Les 18 octobre, 7 novembre, 17 octobres
etc.… n’ont pas suffits !!! ?
2.
L’objectif du texte fondateur: S’agit-il d’un texte de déclaration de principe qui recadre les
revendications et les valeurs communs de forces politiques dans le cadre d’une alliance conjoncturelle
pour se démarquer des autres expressions? Ou plutôt un texte qui présente l’axe principal d’une
coalition porteuse d’un projet politique et envisageant de se présenter aux élections donc qui a une
chance, comme toute autre sensibilité, de gouverner le pays ? En fonction de l’objectif du front notre
regard et nos critiques sur le contenu du texte fondateur seront différents.
Il faut juste comprendre qu’il est normal que cet amalgame existe, du moins dans mon esprit,
puisqu’on est réellement dans une période où coexistent dans le temps et dans l’espace deux
campagnes politiques différentes. La première se traduit par la mobilisation et les manifestations,
d’une rue, longtemps, opprimée et obligée au silence forcé, pour s’acharner contre tout symbole de
l’ancien régime-tyran. La surenchère et l’excès verbal sont dans ce cas là compréhensibles. Quant à
la deuxième, il s’agit bien, si l’on croit ce qu’on nous a dit, d’une période préélectorale sur la base
de laquelle le tunisien aura à choisir au bout de 6 mois entre les différents projets en fonction de ses
aspirations et ses attentes. Dans ce dernier cas toute formule est importante et tout verbe compte.
Or le contenu du texte fondateur donne des positions claires sur le type de régime à mettre en place et
sur les politiques économiques (Nationalisation des secteurs privés, rupture avec la politique libérale
et capitaliste) et internationales du pays me laisse supposer (jusqu’à preuve du contraire) qu’il s’agit
plutôt d’une alliance électorale. Ceci m’incite à m’interroger sur la crédibilité de ces propositions et
à exprimer un doute sur la validité d’une formule préétablie extraite, d’une façon la plus fidèle, des
thèses politiques de l’extrême gauche des années 70 sans tenir compte que nous sommes en 2011 et
que plein d’événements internationaux ont eu lieu entre temps. Enfin ce front prétend « conduire la
révolution de notre peuple pour réaliser ses objectifs » tout en intégrant dans son texte fondateur la
nécessité urgente « de nationaliser les secteurs privatisés et rompre radicalement avec le capitalisme
et le libéralisme ». Or je crois que tout le monde est d’accord que la révolte qui s’est transformée
en soulèvement et qui, à son tour s’est transformé en révolution (après départ du tyran) n’à jamais,
jusqu’au 20 janvier, date de la publication de ce texte, prétendu adopter des thèses de lutte des classes.
Elle n’a jamais été conduite non plus tel ou tel courant idéologique, autrement on l’aurait su.
Je crois, avec tous mes respects aux fondateurs du front, qu il s’agit d’une malveillance intellectuelle
et de la pure démagogie et récupération politique. Je croyais que faire parler les morts pour leur faire
dire ce qu’ils n’ont jamais pensé et transposer ses propres idées et fantasmes sur des événements
populaires faisaient partie des anciennes pratiques à l’université. Enfin en se fixant de tels objectifs
pour « conduire la révolution » ce front devrait, en cas de la réussite, (laissons nous fantasmer nous
aussi) ou bien appliquer à la lettre ce qu’il a promis au peuple et dans ce cas instaurer un enferment
et un blocage économique dans un pays qui vit du tourisme et de l’import et de l’export ; ou bien il
sera amené à vendre un discours à la population pour appliquer le contraire. Tout cela annonce bien le
degré du sérieux de ce front et de ses fondateurs.
3.
La composition du Front: Par mon appartenance à la gauche progressiste tunisienne, quoi
que je demeure libre et indépendant, je crois, dans le contexte actuel, à la nécessité d’une composition
d’une alliance large de démocrates et progressistes, regroupant des syndicalistes, des intellectuels,
des artistes, des jeunes, des femmes, des associations et des partis politiques démocrates plutôt qu’à
un front réduit de l'extrême gauche. Je pense qu’une telle alliance fausse le clivage réel et me laisse
sceptique sur l'efficacité de son action et sur le sérieux de sa démarche.
D’une manière simplifiée je crois qu’actuellement le paysage politique tunisien est composé
naturellement de trois grandes familles (tenant compte de l’élan de libertés acquis après la chute de
l’ancien régime qui à imposé à son tour auparavant un clivage à sa guise):
- Les héritiers politiques de l'ancien régime (dont une partie se fait discrète actuellement et une
deuxième partie, qui est la plus dangereuse, s'immisce, dans les manifestations populaires, dans le
mouvement de révolution). Ceux là auront à choisir entre une ultime tentative de reprise du pouvoir ou
la composition avec les autres forces pour appuyer un tel ou un tel projet. Il est à noter qu’ils disposent
d’une capacité formidable de s’adapter avec tous les scénarios pour préserver leurs intérêts (pour
être connus par leur soutien, à la veille de 7 novembre, de la présidence à vie de Bourguiba pour se
retourner contre lui le lendemain, pour ensuite céder le pouvoir aux policiers du régime et finir comme
spectateurs devant la domination de la mafia du président déchu) et ceci quelle que soit la force
politique gagnante le lendemain du processus électoral.
FIN DE LA PREMIERE PARTIE
source: Anouar Kanzari
Le texte du Front 14 janvier mérite une analyse et une lecture approfondie. Qu’on soit d’accord ou
pas avec cette initiative c’est quasiment un devoir de l’analyser et de la prendre au sérieux du moment
qu’elle émane d’un ensemble d’organisations et de sensibilités politiques qui prétendent se placer au
cœur de la révolution et s’autoproclament sa direction. Le texte fondateur se veut l’expression des
revendications et des objectifs de la révolution. Il s’agit donc d’un front qui se voit capable (si l’on
croit le fantasme de ses auteurs) représenter le peuple et le conduire vers la réalisation des (supposés)
objectifs de sa révolution.
Anouar Kanzari
La constitution de fronts et d’alliances sur la base des revendications et des objectifs communs
dans ce contexte est, dans l’absolu, tout a fait légitime. C’est même positif. Il est temps pour les
forces politiques de commencer de politiser le peuple au sens large du terme (lequel, est pour
une fois, très à l’écoute et intéressé par la politique) après 23 ans de divorce prononcé et imposé
injustement par un despote Dictateur. Il est primordial que les partis politiques s’expriment dans
cette étape révolutionnaire de laquelle dépend tout notre avenir d’autant que, paradoxalement, les
acteurs principaux de notre magnifique révolution sont des jeunes qui ne font confiance ni aux
partis politiques existants ni aux partis tout court. Il est enfin très important que les partis politiques
s’expriment pour expliquer leurs identités et orientations politiques, au-delà des qualifications de
l’ancien régime que tout le monde partage actuellement (y compris ceux qui juraient l’infaillibilité
pontificale de ce régime jusqu’au dernier quart d’heure de son existence).
Le rassemblement des sensibilités politiques dans des alliances et coalitions autour de projets de
gouvernance est tout à fait naturel dans cette phase préélectorale. C’est par rapport à ces projets et
ces coalitions que le citoyens choisiront leurs futurs représentants et gouvernants utilisant le plus
démocratique et le plus révolutionnaire moyen qu’est le vote. C’est dans ce cadre, et c’est à ce juste
titre, que je me permets de saluer cette démarche pour son mérite du déclenchement du débat politique
avec ses prises de position publiques affichés et assumés par les partis signataires.
A la lecture du texte fondateur du Front 14 janvier j’apprécie la clarté du discours et de sa parfaite
transcription de l’identité de ses auteurs. Les signatures nous apportent aussi une nouvelle prometteuse
qui nous laisse penser qu’une famille politique (aussi réduite soit-elle) s’est enfin retrouvée après de
longues années de séparation où certaines composantes ont tantôt joué solo et tantôt entré dans des
alliances contre-nature avec des forces politiques portant les antipodes de leurs thèses.
Néanmoins, je ne peux pas m’empêcher d’exprimer certaines (voire plusieurs) interrogations et
réserves sur la forme et sur le fond du texte fondateur du front. Du titre jusqu’aux signatures du texte,
plusieurs clarifications méritent d’être apportées par ses auteurs.
Ce qui suit l’essentiel de ces réserves:
Le nom donné au front « Front 14 janvier » : Si je ne me trompe pas il s’agit du jour du
1.
départ de Ben Ali donc le jour où le peuple soulevé a réussi à faire tomber l’un des régimes les plus
répressifs du monde et qui a régné par la force et par le sang sur le pays pendant 23 ans. C’est donc un
événement exceptionnel historique de libération qui mérite d’être commémoré par tous les Tunisiens.
Je ne vois donc pas de quel droit les signataires s’accaparent cette date, qui sera très probablement une
fête nationale, pour l’identifier à une alliance qui regroupe une partie des forces politiques. D’autres
part, jusqu’à quand on continuera-t-on à mettre les dates de l’année au cœur des polémiques à la
Libanaise, entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Les 18 octobre, 7 novembre, 17 octobres
etc.… n’ont pas suffits !!! ?
2.
L’objectif du texte fondateur: S’agit-il d’un texte de déclaration de principe qui recadre les
revendications et les valeurs communs de forces politiques dans le cadre d’une alliance conjoncturelle
pour se démarquer des autres expressions? Ou plutôt un texte qui présente l’axe principal d’une
coalition porteuse d’un projet politique et envisageant de se présenter aux élections donc qui a une
chance, comme toute autre sensibilité, de gouverner le pays ? En fonction de l’objectif du front notre
regard et nos critiques sur le contenu du texte fondateur seront différents.
Il faut juste comprendre qu’il est normal que cet amalgame existe, du moins dans mon esprit,
puisqu’on est réellement dans une période où coexistent dans le temps et dans l’espace deux
campagnes politiques différentes. La première se traduit par la mobilisation et les manifestations,
d’une rue, longtemps, opprimée et obligée au silence forcé, pour s’acharner contre tout symbole de
l’ancien régime-tyran. La surenchère et l’excès verbal sont dans ce cas là compréhensibles. Quant à
la deuxième, il s’agit bien, si l’on croit ce qu’on nous a dit, d’une période préélectorale sur la base
de laquelle le tunisien aura à choisir au bout de 6 mois entre les différents projets en fonction de ses
aspirations et ses attentes. Dans ce dernier cas toute formule est importante et tout verbe compte.
Or le contenu du texte fondateur donne des positions claires sur le type de régime à mettre en place et
sur les politiques économiques (Nationalisation des secteurs privés, rupture avec la politique libérale
et capitaliste) et internationales du pays me laisse supposer (jusqu’à preuve du contraire) qu’il s’agit
plutôt d’une alliance électorale. Ceci m’incite à m’interroger sur la crédibilité de ces propositions et
à exprimer un doute sur la validité d’une formule préétablie extraite, d’une façon la plus fidèle, des
thèses politiques de l’extrême gauche des années 70 sans tenir compte que nous sommes en 2011 et
que plein d’événements internationaux ont eu lieu entre temps. Enfin ce front prétend « conduire la
révolution de notre peuple pour réaliser ses objectifs » tout en intégrant dans son texte fondateur la
nécessité urgente « de nationaliser les secteurs privatisés et rompre radicalement avec le capitalisme
et le libéralisme ». Or je crois que tout le monde est d’accord que la révolte qui s’est transformée
en soulèvement et qui, à son tour s’est transformé en révolution (après départ du tyran) n’à jamais,
jusqu’au 20 janvier, date de la publication de ce texte, prétendu adopter des thèses de lutte des classes.
Elle n’a jamais été conduite non plus tel ou tel courant idéologique, autrement on l’aurait su.
Je crois, avec tous mes respects aux fondateurs du front, qu il s’agit d’une malveillance intellectuelle
et de la pure démagogie et récupération politique. Je croyais que faire parler les morts pour leur faire
dire ce qu’ils n’ont jamais pensé et transposer ses propres idées et fantasmes sur des événements
populaires faisaient partie des anciennes pratiques à l’université. Enfin en se fixant de tels objectifs
pour « conduire la révolution » ce front devrait, en cas de la réussite, (laissons nous fantasmer nous
aussi) ou bien appliquer à la lettre ce qu’il a promis au peuple et dans ce cas instaurer un enferment
et un blocage économique dans un pays qui vit du tourisme et de l’import et de l’export ; ou bien il
sera amené à vendre un discours à la population pour appliquer le contraire. Tout cela annonce bien le
degré du sérieux de ce front et de ses fondateurs.
3.
La composition du Front: Par mon appartenance à la gauche progressiste tunisienne, quoi
que je demeure libre et indépendant, je crois, dans le contexte actuel, à la nécessité d’une composition
d’une alliance large de démocrates et progressistes, regroupant des syndicalistes, des intellectuels,
des artistes, des jeunes, des femmes, des associations et des partis politiques démocrates plutôt qu’à
un front réduit de l'extrême gauche. Je pense qu’une telle alliance fausse le clivage réel et me laisse
sceptique sur l'efficacité de son action et sur le sérieux de sa démarche.
D’une manière simplifiée je crois qu’actuellement le paysage politique tunisien est composé
naturellement de trois grandes familles (tenant compte de l’élan de libertés acquis après la chute de
l’ancien régime qui à imposé à son tour auparavant un clivage à sa guise):
- Les héritiers politiques de l'ancien régime (dont une partie se fait discrète actuellement et une
deuxième partie, qui est la plus dangereuse, s'immisce, dans les manifestations populaires, dans le
mouvement de révolution). Ceux là auront à choisir entre une ultime tentative de reprise du pouvoir ou
la composition avec les autres forces pour appuyer un tel ou un tel projet. Il est à noter qu’ils disposent
d’une capacité formidable de s’adapter avec tous les scénarios pour préserver leurs intérêts (pour
être connus par leur soutien, à la veille de 7 novembre, de la présidence à vie de Bourguiba pour se
retourner contre lui le lendemain, pour ensuite céder le pouvoir aux policiers du régime et finir comme
spectateurs devant la domination de la mafia du président déchu) et ceci quelle que soit la force
politique gagnante le lendemain du processus électoral.
FIN DE LA PREMIERE PARTIE
source: Anouar Kanzari
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